Procédé au collodion humide (négatif sur verre) 1850-1880

Julia Margaret Cameron Portrait de Julia Jackson Négatif plaque de verre traitée au collodion humide, positif sur papier albuminé
Julia Margaret Cameron (1875-1879) – Portrait de Julia Jackson Négatif sur plaque de verre traitée au collodion humide, positif sur papier albuminé

En bref :
Le procédé au collodion humide concerne un négatif sur plaque de verre, le positif est sur un papier albuminé. C’est la méthode dominante pour les négatifs sur verre au 19ème siècle. Son utilisation va démoder le daguerréotype et le calotype.
2 énormes inconvénients :
– l’obligation de prendre la photo dès la pose du collodion sur la plaque puis de la développer avant séchage du collodion
– l’hypersensibilité à la couleur bleue. Mais Gustave Le Gray par exemple s’adapte en combinant par montage 2 négatifs pour ses photos de mer, un pour le ciel, un pour la mer (voir un exemple avec une photo de Le Gray ci-dessous).
Avec un négatif au collodion humide, le niveau de rendu des détails est très bon et, grâce à ce procédé, le temps d’exposition passe de quelques minutes à quelques secondes.

Inventeur
Le négatif au collodion humide a été inventé par Frederick Scott Archer (anglais) en 1848.

Date d’utilisation
La fourchette large : 1850 – 1880 en Europe et aux USA où ce procédé est dominant dans la décennie 1870 – 1880.

Apport ou qualité
Le procédé au collodion humide devient la méthode dominante pour la production de négatifs sur verre au 19ème siècle.
Sa grande sensibilité permet d’obtenir des clichés au grain très fin et des plages de gris très étendues.
Les temps de pose sont très raccourcis. Ils ne se comptent plus en minutes mais en secondes.
Le procédé est peu coûteux et la préparation est plus rapide pour que les plaques au gélatino-bromure qui apparaissent vers 1880.

Technique
On produit du collodion par dissolution de nitrate de cellulose dans un mélange d’éther et d’alcool. Puis on en recouvre une plaque de verre qu’on trempe ensuite dans un bain de nitrate d’argent pour la sensibiliser.
Cette préparation est à faire dans l’obscurité totale.
La plaque de verre est ensuite introduite dans l’appareil, exposée quelques secondes et développée avec une solution soit d’acide pyrogallique, soit de sulfate de fer ammoniacal. Elle est ensuite fixée dans un bain de thiosulfate puis vernie pour la protéger des abrasions.
L’image apparaît par contact entre le négatif verre et le papier après que les deux aient été exposés au soleil pendant un temps variant entre quelques minutes et une heure selon la luminosité.

Conditions de prise de vue
Avec le négatif au collodion humide, il n’y a pas une minute à perdre entre la préparation de la plaque puis la prise de vue puis le développement. Le collodion ne doit pas sécher sinon il devient imperméable aux solutions de développement. Les opérations sont à faire sur le terrain même, depuis la préparation de la plaque jusqu’au tirage final du cliché.

Inconvénients liés au négatif au collodion humide
– Le photographe doit apporter son laboratoire sur le lieu de la prise de vue. C’est un gros problème pour les photographes « reporters »  et pour tous les photographes qui travaillent dans la nature.
– La plaque est hypersensible à la couleur bleue donc les ciels sont très blancs.
Pour compenser ceci :
Comme il faut un temps d’exposition plus court pour le ciel que pour le reste de l’image. Gustave Le Gray font un montage de 2 négatifs différents pour un même tirage de ses marines (photographies de mer), un négatif pour le ciel, un négatif pour la mer.

 

Gustave Le gray - Brick au clair de lune - 1856-1857 - Superposition 2 négatifs Gustave Le gray (1820 – 1864) – Brick au clair de lune – 1856 ou 1857
Juxtaposition de 2 négatifs, un pour le
ciel, un pour la mer

Quel support pour le négatif ?
Ce procédé concerne un négatif sur plaque de verre.

Quel support pour le positif ?
Un papier albuminé.

Format
De 6 cm x 8 cm pour les plaques les plus petites jusqu’à 46 x 63 cm pour les plus grandes.

Quels photographes ?
Les portraits de Nadar, les paysages de Gustave Le gray, les frères Bisson en expédition au Mont Blanc ( !), toute la photographie japonaise entre 1860 et 1895.

Avant cette technique
Les daguerréotypes et calotypes qui furent démodés par ce procédé.

Ensuite
Vers 1870 : le négatif au collodion sec.
Vers 1880 : la plaque sèche au gélatino-bromure d’argent.

Une pratique contemporaine : Sally Mann dans sa série Deep South en 1998
Pour cette série Sally Mann a traversé le sud profond de la Louisiane avec avec un appareil photo grand format. Elle avait installé une chambre noire de fortune à l’arrière de sa voiture, C’est là qu’elle préparait ses négatifs et faisait ses tirages au fur et à mesure des prises de vues.
Sally Mann voulait dans cette série montrer les lieux qui avaient été témoin des carnages de la guerre civile américaine. Au XXème siècle, il ne restait à voir que des marécages silencieux, des bords de rivières tranquilles, des chemins bucoliques.
La pratique très artisanale du collodion humide a des répercutions sur les positifs : stries, rayures, taches et piqûres. Sally Mann a crée ainsi une couche de lecture supplémentaire pour ses images. Ces imperfections matérialisent les stigmates devenus invisibles de ces lieux au passé douloureux.

Sally Mann -  série Deep South - Untitled (Fontainebleau) - 1998
Sally Mann – Série Deep South – Untitled (Fontainebleau) – 1998